21 février 2001
Après 5 heures de bus plutôt tranquille, on est à Jaïpur, 256 kms au Sud Ouest de Delhi. Sur la route, le paysage passe de verdoyant à sec, et les dromadaires deviennent plus fréquents que les chevaux comme bêtes de trait. On voit des buffles, dromadaires, et vaches devant les maisons avec les cochons, chèvres et moutons. On s’est trouvé une chambre simple mais propre avec les toilettes et douche à l’extérieur. Eau froide uniquement. Mais alors dans quel cadre! Un ancien palais transformé en hôtel où de petits bâtiments entourent une grande pelouse où l’on peut se reposer dans les transats. Et le tout pour 175 roupies (moins de 30 FF). Le Diggi palace qu’il s’appelle.
On profite de notre superbe palais! Transats sur une superbe et immense pelouse verte. Super dinner: soupe tomates et légumes, lentilles (dahl) pour Lionel, et Thali pour moi. Super bon, pas trop épicé. Le Thali est un plat indien hyper copieux servi dans une énorme assiette en fer ronde, à compartiments. Il comporte: riz, épinards, légumes (genre de ratatouille), carottes et concombres crus, lentilles, yaourt hyper bon, seul chose non epicée.
22 février 2001
Ce matin, lavage de culottes, douche froide très agréable, ça rafraîchit car ici on est plutôt vers 28, 30 degrés, je crois. Et départ pour le centre ville de la " pink city “, la ville rose, l’ancienne Jaïpur emprisonnée par les remparts. Ici plus qu’ailleurs, la fourmilière grouille et le bruit est terrible. On a du mal à marcher de front alors on se suit. De toute façon, on ne peut pas se parler tellement le vacarme est assourdissant. Par contre, il y a peu de voiture. Les vélos, moto et mobylettes, charrettes à bras, chevaux, grandes vaches, dromadaires, vélos et rickshaws et piétons les remplacent. Tout ce monde tournoie sans arrêt, se souciant fort peu du code de la route et des gendarmes qui s’évertuent à faire la circulation comme ils peuvent. Il faut dire que les vaches couchées dans les ronds-points et les rues ne facilitent pas les choses. Nous passons par le quartier des vendeurs de tissus et tailleurs, puis celui des tailleurs de pierres, etc. Les spécialités se succèdent au rythme des ruelles. Partout, le sol est jonché de détritus mais partout aussi, les gens se lavent, époussettent leurs vélos, balaient leur échoppe de 3 m2. Chacun semble respecter une propreté individuelle. Par contre, collectivement, c’est pas nickel du tout ! Mais à part quand ça sent le pipi -certaines rues servent de WC publics- ça va. En plus, les ordures ont le mérite de nourrir les chiens et les vaches (et aussi les rats malheureusement)…
Visite du superbe palais des vents tout rose. En fait, c’est une façade extérieure qui est chouette. Dedans, il y n’y a pas grand chose à faire à part profiter de la vue surplombant la fourmilière. Ensuite, on part à Jantar Mantar, l’observatoire astronomique édifié par Jai Singh II, créateur et roi de Jaipur. C’est un endroit très amusant, il a fait des instruments de mesure géants afin d’obtenir des mesures plus précises ! Pas bête ! Ainsi, pour donner l’heure par exemple, il y a un cadran solaire géant sur lequel on peut monter grâce à un escalier de 20 mètres de haut environ. Bref, on dirait un immense parc d’attraction. Entre temps, on a tout de même mangé deux bananes chacun en guise de petit déj’ et ensuite coca et samosa pour moi, rien pour Lionel qui se méfie de son estomac (lequel grogne beaucoup) comme déjeuner. Faut faire attention, on a tendance à oublier de manger. En fait, il n’y a rien de super appétissant ici, donc ça ne donne pas envie de manger, c’est très différent de la Jordanie. Le samosa, c’est un genre de beignet fourré aux pommes de terre et légumes. Ca s’achète dans la rue aux petits marchands et j’adore ça ! C’est un peu épicé. L’autre gros contraste avec la Jordanie, c’est le tempérament des indiens. Ils ne sont pas blagueurs et prêts à rire comme les Jordaniens à la moindre occasion. Ils sont plutôt sérieux et parfois même agressifs envers nous (” achète-moi ça ! Pourquoi tu ne me donnes pas 10 roupies ?) C’est moins reposant, mais bon, c’est un caractère forgé par les dures conditions de vie ici…
Ce qui est poilant avec les Indiens, c’est leur curiosité. A l’instant, une fillette s’est penchée au-dessus d’une barrière. Immédiatement un garde a crié et a couru pour la sauver (ça fait quand même 1 mètre de haut et la fillette a bien 6 ou 7 ans!). Bon réflexe. En même temps, les 50 indiens des 20 mètres alentours en ont fait autant et chacun s’est intéressé à " l’affaire “. Faut dire qu’il avait le temps d’observer, ce gardien. A l’entrée de l’observatoire, il y a au moins 5 ou 6 gardiens pour surveiller et contrôler les billets. Dont un gars avec une cravate, ça doit être le chef. En vérité, il y en a un qui déchire les billets et les autres qui glandent à fond, assis sur un banc. Autre exemple de la curiosité des Indiens, dans le train de Delhi à Agra, il y a eu une histoire entre un militaire et un indien. Tout le wagon a tendu l’oreille et 5 minutes après, ils étaient tous debouts, agglutinés autour des 2 héros de l’histoire! Allez, encore une petite: dans Old-Delhi, on s’était mal compris avec le vélo-rickshaw, et au moment de payer, on lui file 20 roupies au lieu des 14 négociées, plutôt heureux de lui faire cette rallonge. Mais il nous en demande encore (par geste, il ne parle pas anglais et nous pas hindi). Immédiatement, un attroupement s’est formé autour de nous! En fait, l’Inde, c’est comme une immense fourmilière, toujours en mouvement. Sans arrêt des gens marchent, se déplacent, c’est un flux continu. Mais dès qu’un truc se passe, ils sont tous disponibles pour le potin. On est resté à l’observatoire au moins deux heures. Une demi-heure pour visiter le site, le reste du temps à glander assis sous un arbre à observer les gens. C’est là qu’on voit des trucs en Inde, pas quand tu courres de monuments en monuments.
23 février 2001
C’est mon anniversaire. Bienvenue au club des trentenaires m’avait dit avec quelques jours d’avance Anne-Sophie. Ca y est c’est fait. Pour fêter cela, on va visiter le Fort d’Ambert à 10 km de Jaïpur. Chouette, une sortie vieilles pierres! Ce qu’il y a de bien avec Marion, c’est qu’elle me connait bien, elle sait ce qui me fait plaisir. Aujourd’hui donc, visite du fort d’Ambert comme joli cadeau d’anniversaire. Je sais, Lionel aurait préféré passer la journée sur internet! On prend le bus en face du palais des vents. Pour cela, le trajet à pied depuis notre palais, au milieu des odeurs d’urine, des poubelles, du bruit, de la poussière, des pots d’échappements et surtout des plus demunis habitants sur le trottoir dans la crasse et le bruit. On se sent tout penauds avec nos jolis sacs à dos et nos lunettes de soleil chicos. C’est du bus que l’on voit nos premiers éléphants. Certains sont hauts comme le bus. Plus loin, en montant à pied au fort, on fait bien attention aux éléphants: on en a vu un uriner et on voudrait éviter de se noyer!
Le fort est dans un beau style indien avec une superbe porte bien kitsch : la Ganesh Pol. Il y a aussi une superbe salle aux murs recouverts de multiples morceaux de miroirs. Bref, ca brille partout. Le plus amusant, ce sont les touristes qui le photographient… au flash! Je doute qu’ils obtiennent grand chose! Lionel s’éclate a observer les touristes japonais et indiens qui s’extasient devant ces murs tout de même très kitsch, il faut le reconnaître. Puis,on se perd (ce n’est pas une image) dans les labyrinthes du palais, passant de couloirs en pente sombre à d’innombrable cours du premier au second étage, puis au rez-de-chaussée sans croiser grand monde ni parvenir à trouver la sortie! Autour du fort, les remparts courent sur la colline épousant leur forme. C’est chouette.
Pour fêter son anniversaire et se porter chance, Lionel a decidé de marcher en sandales dans une bouse de vache. Pour se remettre, il a decidé de goûter un samosa en guise de déjeuner, delicieux beignet formé de patates et petits pois, légèrement epicé, en forme de gros berlingot et qui a le mérite de coûter 2 à 4 roupies. Le pompon de la fête: quelques heures dans les transats à siroter du pepsi en mangeant des oranges. On n’a pas tous les jours 30 ans!
Depuis qu’on est en Inde, chaque fois qu’on va visiter un endroit comme le Taj Mahal ou le Fort d’Ambert cet apèes-midi, il y a plein de touristes partout. Des européens bien sûr, dont un bon nombre de francais, des asiatiques beaucoup. Mais il y a en majorité des indiens. D’après ce que j’ai compris, avant en Inde tu avais les très riches et les très pauvres. Les deux existent encore. Mais il y a en plus depuis quelques années l’émergence d’une classe moyenne. Ils ne sont ni riches ni pauvres. Ils voyagent beaucoup en Inde pendant leurs vacances. Ils sont bien sapés, toute leur petite famille (si on peut dire petite avec 4 ou 5 enfants) est toute endimanchée. Ils possèdent une télévision, une voiture, des appareils photo, des caméscopes, des montres et des bijoux.
Ce soir nous sommes toujours dans nos transats sur la pelouse. La nuit tombe et nous admirons le ballet incertain des chauves souris.